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L'ENDEAVOUR, 1761

Les voyages d'exploration de James Cook


1 - UN NAVIRE CHARBONNIER DEVENU EXPLORATEUR

Au XVIIIe siècle, les corvettes et les sloops étaient de petits bâtiments de guerre, de construction légère, avec un seul pont pour les canons (dont le nombre variait de 18 à 30). Ces navires étaient utilisés dans les flottes de guerre pour la surveillance et la liaison. En fait, ces corvettes devinrent célèbres grâce aux voyages scientifiques.
La corvette l’Endeavour était à l’origine un navire de charge charbonnier de 368 tonneaux. Elle s’appelait Earl of Pembroke. James Cook la rebaptisa et la réarma avec 10 canons de 4 livres et douze pièces légères à main. Cook avait choisi un navire charbonnier pour son premier voyage parce qu’il avait commencé sa carrière de marin comme mousse sur cette sorte de navire et qu’il avait pu en apprécier toutes les qualités : “plus spacieux, plus propre à s’approcher de terre et pouvant être manœuvré avec moins de monde que d’autres bâtiments de charge.” La coque de l’Endeavour était revêtue d’un doublage de bois traité contre les vers (le doublage en cuivre, habituel dans la marine anglaise à l’époque, aurait été difficile à réparer dans les îles du bout du monde).
L’Endeavour fut le premier navire muni d’un appareil de distillation de l’eau de mer.

2 - JAMES COOK, UN MARIN AUTODIDACTE

Né en 1728, James Cook est le deuxième des neuf enfants d’un simple ouvrier agricole. A treize ans, il entre en apprentissage chez un épicier d’un village de pêcheurs. Un an plus tard, il s’enfuit, gagne le port voisin et s’engage comme mousse sur un bateau charbonnier. Durant l’hiver, opiniâtre, il étudie les mathématiques. Six ans plus tard, il est second à bord d’un autre charbonnier.
Il aurait vraisemblablement poursuivi cette carrière jusqu’à la retraite si la guerre de Sept Ans n’avait pas tout changé. En 1756, désirant servir son pays, Cook s’engage dans la Marine royale. Ses connaissances en géographie et en astronomie continuent de s’étoffer. En 1758, il part pour le Canada avec la mission de sonder le Saint-Laurent et dresse la cartographie de l’embouchure du fleuve.
En 1762, il se marie et aura six enfants. Devenu ingénieur-hydrographe, il part à Terre-Neuve à la fin de la guerre (1763) pour en établir, durant quatre ans, la cartographie ainsi que celle des côtes du Labrador. En 1766, il rédige un mémoire sur l’éclipse du soleil observé à Terre-Neuve. C’est ainsi lui qui sera chargé par la Royal Society de diriger une expédition vers Tahiti pour observer dans les mers du Sud le passage de Vénus sur le disque solaire. On espérait de la sorte calculer la distance de la Terre au Soleil. Les voyages d’exploration vont désormais être indissolublement associés à son nom.

Cook était l’homme de la situation. Avec un physique grand, fort, il arborait une expression sévère et, quand il discutait, ne supportait pas la moindre contradiction. Les règlements en vigueur étaient appliqués à la lettre et les punitions, en cas de manquement, inexorables. Mais il n’était jamais injuste et savait toujours prévoir le danger qui pouvait menacer son bâtiment. Ayant été lui-même matelot, il connaissait les besoins des hommes, l’utilité de la discipline et la nécessité de la propreté du navire.

3 - LE PREMIER VOYAGE D'EXPLORATION (1768-1771)

Seul le premier voyage se fit sur l’Endeavour. Cook emmène une équipe de scientifiques dont Joseph Banks, âgé de vingt-cinq ans, qui allait plus tard acquérir une renommée internationale en tant que protecteur des sciences naturelles. Parti en août 1768 de Plymouth, l’Endeavour cingle vers le cap Horn et arrive en mars 1769 dans une petite île des Tuamotu. Le mois suivant, Cook aborde à Tahiti où, grâce à sa courtoisie avec les indigènes, il peut établir un campement et un observatoire astronomique. A Tahiti, il note soigneusement toutes ses observations sur la vie et les mœurs des Tahitiens, données très précieuses qu’il enrichira lors des voyages suivants.
Peu après, il reconnaît les îles de l’archipel (qu’il appelle îles de la Société) et en relève minutieusement le tracé. L’Endeavour se dirige ensuite vers le continent austral. En septembre, il aperçoit les côtes de la Nouvelle-Zélande et en dresse la carte malgré l’hostilité des indigènes.
En mars 1770, le navire mouille l’ancre dans Botany Bay, sur la côte orientale de l’Australie. Là, les botanistes de l’expédition découvrent des centaines de végétaux inconnus, tandis que les contacts avec les naturels sont rendus difficiles de par leur caractère très craintif.
Puis l’Endeavour fait voile au nord. Malgré des récifs et des hauts-fonds omniprésents, malgré aussi la férocité des habitants qui l’accueillent à coup de javelines, il explore la côte Est sur 2000 km et baptise la région Nouvelles-Galles du Sud. Il en prend possession au nom du roi George III. C’est là que les naturalistes rencontrent pour la première fois les kangourous. L’expédition rapporta la peau naturalisée d’un spécimen de moyenne taille (dont George Stubbs fit un tableau). Contrairement à ce que l’on crut alors, ils n’étaient pas les premiers Européens à voir des kangourous. Cent cinquante ans plus tôt, en 1629, le capitaine hollandais Pelsaert, échoué près des îles Wallabies au nord de l’Australie avait rencontré un kangourou femelle de petite espèce (appelé depuis wallaby) avec un petit suspendu à une tétine dans la poche de sa mère. Mais son rapport était passé inaperçu. Au cours de cette exploration, l’Endeavour s’échoua sur un récif de corail, mais parvint à se dégager. Le navire faisant eau, Cook se décida à rentrer en Angleterre via Batavia (île de Java) et le cap de Bonne-Espérance. Avec un équipage décimé par la malaria et les fièvres tropicales, le navire rejoignit la côte anglaise en juin 1771. Sur les 94 hommes partis de Plymouth, seuls 56 revinrent.

L’accueil fut triomphal. L’expédition rapportait mille espèces de plantes séchées dans les herbiers et sous forme de graines, cinq cents poissons conservés dans l’alcool, cinq cents peaux d’oiseaux, plusieurs centaines d’échantillons minéralogiques et d’innombrables insectes. Mille trois cents dessins d’une minutieuse exactitude illustraient la documentation. Le journal de bord de Cook, tenu au jour le jour, devint un modèle à suivre pour les futurs explorateurs. Avant d’être publié, il fut enrichi des notes des scientifiques du voyage et remanié par un littérateur qui, malheureusement, y ajouta ses commentaires personnels, pas toujours fidèles à l’esprit du navigateur. La relation du premier voyage de Cook connut néanmoins un immense succès en Angleterre, puis en France, en Italie et en Allemagne. .

4 - LE DEUXIÈME VOYAGE D'EXPLORATION (1772-1775)

En 1772, Cook repart vers le sud avec deux navires charbonniers, la Resolution et l’Adventure. Son objectif est de trouver un éventuel continent austral (thème très à la mode dans les cercles cultivés européens) et de l’explorer. En janvier 1773, pour la première fois au monde, le cercle polaire antarctique est franchi. Cook le reconnaît vide de toute présence humaine. Puis les navires cinglent à travers un stupéfiant univers de glaces pendant 171 jours. Après s’être perdus et retrouvés, ils font route vers Tahiti.
De là, l’expédition repart à la découverte des atolls du Pacifique, puis retourne vers les glaces de l’extrême Sud lors de l’été austral de 1773-1774. En avril, Cook découvre l’île de Pâques. En août, il aborde les Nouvelles-Hébrides où il fait donner le canon contre les anthropophages mélanésiens qui massacrent plusieurs de ses hommes. En juin 1775, les navires sont de retour à Londres.

5 - LE TROISIÈME VOYAGE D'EXPLORATION (1776-1780)

La Société royale de géographie confie à Cook une nouvelle mission : découvrir le passage du Nord-Ouest reliant l’océan Pacifique à l’océan Atlantique. A cette époque, Cook, malgré par l'âge et la fatigue de ses voyages, était devenu colérique et atrabilaire. Un caractère qui n'est pas idéal pour être le chef d'une mission d'exploration.
Néanmoins il embarque à bord du Resolution en juillet 1776, rejoint par le Discovery au cap Horn. Après un passage par Tahiti, Cook découvre les îles Sandwich (actuellement îles Hawaï) en janvier 1778. Il procède ensuite au relevé des côtes du Pacifique septentrional et rencontre des esquimaux dans la future baie de Vancouver, puis des Russes, comme lui à la recherche du fameux passage du Nord-Ouest à travers l’Arctique. Il se heurte bientôt à une véritable mer de glace et doit rebrousser chemin. Les navires essuient peu après une tempête épouvantable qui les pousse à mouiller dans l’archipel hawaïen. Depuis le départ d'Angleterre, son caractère irascible avait déjà causé de nombreux conflits entre lui et l'équipage.
A Hawaï, bénéficiant de l'accueil pacifique des naturels de la baie où il a mouillé, le navire fait le plein de vivres (fruits et légumes essentiellement). Cook lève l’ancre le 4 février 1779. Une nouvelle tempête et la casse de gréements le contraignent à rebrousser chemin. Malgré les conseils de ses lieutenants, le capitaine décide de revenir dans la baie d’où il était parti. Les indigènes, qui avaient déjà beaucoup donné, sont d'abord désappointés, puis, devant les exigences de Cook en fourniture de vivres, se montrent de plus en plus menaçants. A l’aube du 14 février 1779, James Cook et plusieurs de ses matelots trouvent la mort, attaqués par des milliers d’indigènes.


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