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Ce quartier du 12e arrondissement de
Paris a vu sa population croître fortement après la
guerre de 14. En 1928, on y décide la construction d'un nouveau
lieu de culte. L'architecte Paul Tournon (1881-1964) se voit chargé
des plans. L'église est achevée en 1935 ; la paroisse
est confiée aux Eudistes (saint Jean Eudes est le fondateur
de la congrégation de Jésus et Marie). L'église
du Saint-Esprit a été bâtie dans le cadre des
Chantiers du Cardinal, une uvre sociale religieuse
créée en 1931 visant à l'édification
d'églises et de bâtiments paroissiaux dans Paris et
sa banlieue.
L'architecte s'est inspiré des églises byzantines
et de l'ancienne basilique Sainte-Sophie de Constantinople. Le bâtiment
est en béton armé, son intérieur (hormis le
vaisseau central) demeure sombre. Plusieurs photos de cette page
ont été éclaircies. Les parois de béton
sont couvertes de très belles fresques modernes...
que l'on ne voit pas ! - à part celle de l'abside (comme
dans la photo ci-dessous) parce qu'elle domine la chapelle axiale
dévolue aux fidèles venus prier.
Soyons honnête : la forte pénombre donne parfois au
béton une agréable apparence de pierre. Par endroits,
le visiteur a l'impression de se retrouver dans la base de sous-marins
allemands de Lorient
(tout en béton) ou... dans la Rome antique (ce qui est une
sensation très dépaysante). Quoi qu'il en soit, pour
ce qui est de l'architecture et de l'atmosphère qu'elle dégage,
l'église du Saint-Esprit, à Paris, est absolument
unique !
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Vue d'ensemble de la nef.
Le petite surface des vitraux ne suffit absolument pas à éclairer
l'ensemble de l'église.
Les bas-côtés (là où se trouvent les fresques)
sont toujours dans une pénombre prononcée. |
La décoration
de l'église. L'architecte Paul Tournon fit
appel à des groupements d'artistes catholiques, tels
que L'Arche ou Les Ateliers d'art sacré.
On note ainsi la participation aux chantiers de l'église
du Saint-Esprit de Louis Barillet, Paul Louzier et Jean-Hébert
Stevens pour les vitraux, de Jean Gaudin et Marcel Imbs pour
les mosaïques, de Carlo Carrabezolles pour les sculptures,
de Raymond Subes pour la ferronnerie et de Jean Dunand pour
le mobilier liturgique.
Les Ateliers d'art sacré ont été
créés en 1919 par Maurice Denis (1870-1943)
et Georges Desvallières (1861-1950). Leur but était
non seulement «de former et d'instruire» (selon
les mots de Denis), mais également «de produire
des uvres d'art pour le service de Dieu». Leur
méthode : innover dans les différents arts (peinture,
sculpture, vitrail et mobilier).
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Pour l'église du Saint-Esprit,
les nombreuses fresques sont toutes rattachées à
une idée unique : la diffusion de l'Esprit-Saint dans
l'histoire humaine. Elles relatent les grandes étapes
de l'Histoire de l'Église depuis la Pentecôte
jusqu'au XXe siècle, divisée en deux grands
thèmes : l'Histoire de l'Église militante et
l'Histoire de l'Église triomphante.
À noter que, pour assurer l'unité de la décoration,
l'architecte Paul Tournon a imposé une taille unique
pour tous les personnages et la couleur rouge comme coloris
de fond.
Source : «Paris d'église
en église» (Massin éditeur), ISBN :978-2-7072-0583-4
Voir plus bas
le texte sur les matériaux et l'appréciation
de l'époque sur les fresques.
Terminons en ajoutant qu'il faut vraiment que toutes les lumières
soient allumées pour voir l'ensemble des fresques.
Ou alors munissez-vous d'une torche électrique comme
dans les grottes, sinon vous sortirez de l'église,
déçu de n'avoir rien vu.
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La façade, avenue Daumesnil (Paris, 12e arr.).
Le clocher culmine à 75 mètres. |
Fresques dans le narthex (Intelligence et volonté). |
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Vue d'ensemble de l'église depuis le chevet.
Le béton armé est recouvert de briques rouges
de Bourgogne. On remarque une série de statues sur le
toit. |
Le narthex et ses fresques en camaïeu gris
des époux Untersteller.
«««---À GAUCHE
Fresques des trois facultés de l'âme : Intelligence,
volonté, sensibilité. Complétées
par des fresques illustrant les quatre éléments
: eau, air, terre et feu |
Statues sur le toit
(uvres de Sarrabezolles, Martin, etc.)
À gauche : «Infirmière» de Georges
Serraz.
Pour éviter les fientes de pigeon, elles sont protégées
par des grilles. Résultat : de la rue, on ne les voit
pas... |
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Les fêtes du mois d'avril
(Lucien Gibert) |
Les fêtes du mois de septembre
(Noël Feurstein) |
Les fêtes du mois d'octobre
(Noël Feurstein) |
Les fêtes du mois de novembre
(Noël Feurstein) |
Le côté gauche
de l'église est orné d'une suite de bas-reliefs
illustrant les mois de l'année et les fêtes religieuses
qui y sont rattachées.
Ces bas-reliefs sont dus à différents artistes
(Gibert, Huntzinger, Guignier, Feurstein, etc.) |
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La nef et les élévations du côté droit.
La photo a été éclaircie. |
La coupole possède un diamètre de 22 mètres et
culmine à 33 mètres. |
Statue rendant hommage au cardinal Verdier, créateur des «Chantiers
du Cardinal» en 1931. |
Fresque de saint Jean et de son aigle sur la voûte.
Fresques de la chapelle des Confesseurs ---»»»
À gauche, «Saint Louis» (Robert-Albert Génicot)
À droite : «Saint François et saint Dominique»
(Raymond Virac)
Cliquez sur le vitrail de Virac pour l'afficher en gros plan.
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Fresque de saint Marc et de son lion sur la voûte.
À DROITE ---»»»
Cliquez pour afficher la fresque en grand format. ---»»» |
Fresque «Sainte Catherine de Sienne» (Marthe Flandrin,
1904-1987). |
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Le bas-côté gauche (éclairé par un flash). |
LE CHEMIN DE CROIX DE GEORGES DESVALLIÈRES
(1893-1962) |
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Chemin de croix
«Jésus est dépouillé de ses vêtements»
(Toile marouflée de Georges Desvallières) |
Chemin de croix
«Jésus console les filles d'Israël»
(Toile marouflée de Georges Desvallières) |
Chemin de croix
«Jésus est cloué sur la croix»
(Toile marouflée de Georges Desvallières) |
Vitrail «Avé Jésus et Marie»
La qualité des vitraux n'est pas ce qui compte
le plus dans l'église du Saint-Esprit. |
Élévations gauches dans la nef (photo très éclaircie).
On remarque la présence de grandes fresques derrière
les colonnes qui séparent le vaisseau central du bas-côté
Ici : «L'Évangélisation de l'Ancien Monde»
d'Henri Marret et Louis Bouquet
Premier niveau : «Grégoire VII» et «Charlemagne»
(Marret) ; deuxième niveau : «Le Concile d'Éphèse»
(Bouquet). |
Fresque dans la chapelle des Confesseurs :
«Le Concordat de Worms» (Mle Roisin)
Cliquez sur l'image pour afficher la fresque en gros plan. |
Vitrail «Hortus Conclusus»
Ce genre de vitrail sépare en deux
les grandes fresques des bas-côtés. |
Fresque dans la chapelle du Travail :
«Ste Bernadette, Pie IX, Vatican I» (André-Hubert
Lemaître)
Cliquez sur l'image pour afficher la fresque en gros plan. |
Fresque : «L'Évangélisation de l'Ancien Monde»
d'Henri Marret (1878-1964)
Partie gauche : «Grégroire VII»
Cliquez sur l'image pour afficher la fresque en gros plan. |
Fresque : «L'Évangélisation de l'Ancien Monde»
d'Henri Marret (1878-1964).
Partie droite : «Charlemagne»
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Vitrail «Sanctus Spiritus»
«««--- Fresque
«L'Église étend ses bienfaits à toute l'Europe» de Marguerite Hanin
Cliquez sur l'image pour afficher
la fresque en gros plan. |
Fresque «Saint Louis» dans la chapelle des Confesseurs
de Robert-Albert Génicot
«Bénis soient tous les pacifiques» (partiel)
La chapelle des Confesseurs est visible plus haut. Cliquez
ici. |
LE CHUR, L'ABSIDE ET LES CHAPELLES ABSIDIALES |
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Le chur de l'église du Saint-Esprit avec son ciborium.
Le ciborium est couvert d'une cloche octogonale qui évoque
la Résurrection. |
Le chur
Statue de la Vierge créée par Ferdinand Parpan |
La chaire à prêcher de Roger Prat.
Elle présente une belle décoration stylisée sur
le dosseret. |
Croix trinitaire de Jean Dunand
dans le chur. |
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Chapelle absidiale gauche «des Martyrs»
Fresques : à gauche, «Saint Pierre et saint Paul»
(Henri de Maistre) ; à droite, «Les actes des Apôtres»
(Pauline Peugniez)
Cliquez sur l'image pour afficher la fresque en gros plan. |
Chapelle absidiale droite dite «du Travail»
Splendide haut-relief représentant la mort de saint Joseph.
uvre du sculpteur Jacques Martin (1885-1976).
Indiscutablement l'une des plus belles uvres exposées
dans l'église. |
«La mort de saint Joseph» de Jacques Martin, détail.
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«La mort de saint Joseph» de Jacques Martin, détail.
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Jacques
Martin (1885-1976).
Né à Marseille, il entre dans un atelier
de sculpture à 15 ans. En 1908, il suit les cours
de l'École supérieure des Beaux-Arts de
Paris. Il y est élève du sculpteur Jules
Coutan et du graveur Auguste Patay. En 1914, il est
premier Grand Prix de Rome. Il expose au Salon des artistes
français (médaille de bronze en 1925).
Il fait alors partie du groupement catholique L'Arche.
Il a réalisé des grands médaillons,
des monuments au morts, des statues de saints et de
saintes, la Vierge de la place Saint-Jacques à
Metz.
Source : «L'église
du Saint-Esprit» de Micheline Tissot-Gaucher (Lys
Éditions Amatteis).
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Abside, fresque de Maurice Denis : «La Pentecôte»
En haut : les apôtres réunis autour de Marie. En
bas : Les Pères de l'Église rassemblés
autour de saint Paul.
Cliquez sur l'image pour afficher la fresque en gros plan |
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Fresque de Jean Dupas dans le bas-côté droit
«Christophe Colomb, Concile de Trente et Renaissance»
Cliquez sur l'image pour l'afficher en gros plan. |
Abside, fresque de Maurice Denis : «La Pentecôte»
Partie basse : Les sacrements et l'Église de 1930.
Cliquez sur l'image pour afficher la fresque en gros plan. |
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La fresque
et le stick B dans les années 1930. Pour
réaliser les décors muraux, l'architecte Paul
Tournon imposa la technique médiévale de la
fresque qui avait été retrouvée au début
du XXe siècle par Paul Baudoin. Maurice Denis,
en charge du grand décor de l'abside, peu à
l'aise avec la fresque qu'il n'avait guère pratiquée,
opta pour une nouvelle méthode et un nouveau matériau
: le stick B.
Rappelons qu'on ne peint pas de n'importe quelle façon
sur un support comme le béton, le ciment ou la pierre.
Les peintures habituelles du commerce risqueraient de ne pas
durer plus de quelques jours... Dans la méthode
de la fresque, on applique d'abord, sur le matériau
brut, un crépi qui va servir de lien entre le mur et
l'enduit qui, lui-même, va recevoir la peinture. Ce
crépi est un enduit assez grossier. L'enduit où
l'on va peindre est un mortier fait de chaux grasse et de
sable. Il doit être frais quand on y applique la peinture.
L'artiste peint à l'eau et à la chaux. L'avantage
de cette méthode est que, une fois l'enduit bien sec,
l'ensemble de la fresque fait partie intégrante du
mur car la chimie vient ici en aide à l'artiste. Bien
sûr, au cours de la dessication, la peinture pénètre
dans l'enduit, mais le point le plus important est la formation
d'une couche cristalline de carbonate de chaux sur la peinture.
Qui est ainsi protégée. La qualité de
cette protection et sa pérennité dépendent
évidemment de la qualité du travail du peintre.
Le travail d'équipe demandé par Paul Tournon
imposa des contraintes techniques rigoureuses lors du chantier
: esquisses, cartons multiples, préparation du mortier,
de l'enduit, des couleurs, etc. L'artiste doit aussi faire
ses preuves comme ouvrier chimiste.
Maurice Denis utilisa la technique du stick B,
mise au point par Pierre Bertin, ancien élève
des Arts Décoratifs, et Alice Lapeyre. Le rendu du
stick B est très voisin de celui de la fresque. La
peinture est ici un produit émulsionné à
la résine et on peut l'appliquer sans peine
sur de grandes surfaces. Celles-ci doivent être
|
préalablement encollées
par le peintre. Le stick B possède un double avantage
sur la technique de la fresque : sa gamme chromatique est
plus étendue et il possible de faire des retouches
après séchage. Il y a malheureusement un inconvénient
de taille : certaines couleurs peuvent changer complètement
d'aspect une fois sèches. Mais le stick B reste plus
simple que la fresque bien que l'absence de matériau
intermédiaire entre le mur et la peinture ait, à
l'époque, soulevé les craintes de l'architecte.
L'appréciation de l'uvre.
L'ensemble des fresques de l'église du Saint-Esprit
fit l'objet d'une critique acerbe. On lui reprocha
son côté compliqué qui rendait nécessaire
un document explicatif. Il est vrai qu'il faut connaître
à fond l'histoire de l'Église catholique pour
s'y repérer... Le côté «amoncellement»,
«enchevêtrement» de dessins accessoires
fut aussi souligné. Enfin, un ecclésiastique
très en cour, le père Régamey, critiqua
le manque de lien entre les différents dessins, jugés
d'ailleurs peu intéressants. Plus sévère,
il écrit dans la revue Art sacré en 1938
(texte cité par les sources) : «Il me semble
que ce n'est là que le cas le plus criant d'un vice
qui est général dans les arts académiques : l'impuissance à prendre un parti, le manque de caractère
des éléments dont aucun n'est arrivé
à un parfait accord avec lui-même ne peuvent
faire ensemble qu'une cacophonie, quelque unité artificielle
qu'on leur impose.»
Rappelons ici que cette critique vous paraîtra hors
de propos si vous visitez l'église : elle est tellement
sombre que le seul décor mural visible est celui de
l'abside peint par Maurice Denis...
Source : «Églises
parisiennes du XXe siècle» Action Artistique
de la Ville de Paris, article «Le Décor mural,
de l'enthousiasme au murmure» par Martine Chenebaux-Sautory.
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Le chur dominé par les grandes structures de béton
de l'abside.
A l'arrière-plan et au centre, la fresque de Maurice Denis
: «La Pentecôte» |
La nef de l'église du Saint-Esprit vue du chur avec ses
grandes élévations en béton armé.
Au-dessus de la grande porte centrale : la stèle en mémoire
du cardinal Verdier (voir plus
haut).
L'orgue de l'église du Saint-Esprit est un orgue «complémentaire»
installé dans la tribune droite et quasiment invisible depuis
la nef. |
Documentation : «Paris d'église
en église», Massin éditeur
+ «L'église du Saint-Esprit» de Micheline Tissot-Gaucher,
Lys Éditions Amatteis. |
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