La ville du Havre a durement souffert en 1944, après le débarquement en Normandie. L'église néogothique qui avait été édifiée de 1873 à 1875, sur un terrain où s'élevait jusque-là une partie des anciens remparts, a été ruinée par les deux bombardements alliés des 14 juin et 5 septembre. Lors de la phase de reconstruction, c'est l'architecte en chef Auguste Perret qui s'occupa personnellement des plans de la nouvelle église Saint-Joseph. Adepte de la théorie du classicisme structurel, celui-ci avait pour le Havre une grande idée : raser le peu qu'il restait des anciens monuments épargnés par les bombes et rebâtir tout à neuf en édifiant la cité sur une dalle. Devant le manque de fonds et une oppostion acharnée à ces destructions supplémentaires, il dut reculer. Pour Saint-Joseph en revanche, point besoin de détruire davantage : les bombes avaient tout rasé.
L'édifice fut bâti de 1951 à 1957. Il se présente comme un gigantesque phare ou encore comme un cierge. Du haut de ses 107 mètres, Saint-Joseph est devenue l'édifice emblématique du centre-ville : c'est le premier monument qu'on aperçoit au loin quand on arrive par la mer et, bien sûr, le dernier que l'on voit quand on s'écarte de la côte. Auguste Perret a utilisé son matériau favori : le béton. Selon les dogmes de l'Art sacré en vigueur à l'époque, aucun parement ne devait cacher le matériau. De même, le décor ostentatoire devait être banni de l'édifice (où l'on ne trouve à l'heure actuelle que trois statues). Perret trouve un allié sûr en la personne de l'abbé Marcel Marie qui réussit à convaincre le clergé et le ministère de la Reconstruction. Sur un carré de 40,6 mètres de côté, le projet consiste à élever une gigantesque tour lanterne qui reposera, dans chaque angle du carré, sur un groupe de quatre piliers (voir photo ci-dessous). Les vitraux sont créés à Saint-Just-sur-Loire par l'artiste Marguerite Huré. Celle-ci utilise du verre antique soufflé à la bouche, de façon à obtenir un verre d'épaisseur irrégulière et au ton plein de nuances.
Une visite à l'église Saint-Joseph du Havre fait plonger dans l'univers gris du béton. On pourra objecter que ce type de matériau n'est guère propice au recueillement, encore moins à la prière des fidèles. Néanmoins, les internautes intéressés se reporteront à d'autres édifices religieux de ce site construits, eux aussi, en béton, quoiqu'avec davantage d'ornementation : l'église Notre-Dame-de-Victoire à Lorient, la cathédrale Notre-Dame à Royan et l'église du Saint-Esprit à Paris dans le 13e arrondissement.