** Version imprimable de l'Astrolabe

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Maquette de la corvette Astrolabe. Initialement c'était un navire de charge pour le transport de la cavalerie.

Longueur : 31 m
Largeur : 8,7 m
Tirant d'eau : 3,7 m
Déplacement : 380 tonneaux
Armement : 14 canons de 6 livres
L'Astrolabe passa en tout trente années dans les expéditions autour du monde, de 1821 à 1851.

Maquette de l'Astrolabe en construction

«A-t-on des nouvelles de Monsieur de La Pérouse?» Cette question du roi Louis XVI, la veille de son exécution, en 1793, est restée célèbre et marque combien le souverain français s'intéressait de près aux voyages d'exploration scientifique. Dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle, l'océan Pacifique et ses îles (qu'on appelle aujourd'hui l'Océanie) étaient un domaine quasiment inexploré. La curiosité des esprits éclairés de l'Europe s'en nourrissait. A tel point que les marins, qui se combattaient sur toutes les mers du monde à cette époque, observaient une neutralité bienveillante ou, carrément, s'entraidaient quand ils se rencontraient dans les mers du Sud.
Le navigateur Jean-François de La Pérouse s'inscrit dans la lignée des premiers Français découvreurs de mondes après les Bougainville, de Kerguelen et autre Surville. Commissionné par le roi, La Pérouse fut le premier explorateur à prendre la mer avec une véritable académie flottante : astronomes, botanistes, naturalistes se devaient d'enrichir les collections nationales avec leurs échantillons ou leurs rapports savants.
La Pérouse quitta Brest en août 1785 avec deux frégates, l'Astrolabe et la Boussole, muni d'instructions précises : son voyage avait été supervisé par le roi en personne. Une escale à Botany Bay, en Australie, en janvier 1788, permit d'envoyer en France la première partie de la moisson scientifique. Ensuite, nul n'eut plus de nouvelles de l'expédition. On apprit bien plus tard que les deux navires avaient fait naufrage devant l'île de Vanikoro, au nord des nouvelles Hébrides en 1788.

La poupe de l'Astrolabe. De la sobriété avant tout

La deuxième Astrolabe (celle représentée ici) était à l'origine un navire de charge pour le transport de la cavalerie et s'appelait la Coquille. C'était une corvette de 380 tonnes lancée en 1811.
Les corvettes possédaient toutes les caractéristiques des voiliers de la première moitié du XIXe siècle, période de l'apogée de la marine à voile. Les navires sont gréés en trois mâts carrés. Les deux mâts principaux (grand-mât et misaine) portent trois voiles carrées, parfois surmontées d'une quatrième, la voile de cacatois. Le mât d'artimon possède une grande voile trapézoïdale, la brigantine, surmontée à son tour d'une ou deux voiles carrées. Enfin, à la proue, on voit apparaître, attachés entre le beaupré et la misaine, les premiers focs triangulaires facilitant la remontée au vent.

Les tempêtes, le feu et la glace sont redoutables pour les voiliers. On voit, sur cette toile d'Ambroise-Louis Garneray, le capitaine Dumont d'Urville et son équipage en train de dégager l'Astrolabe dans l'Antarctique en février 1838.

L'Astrolabe, qui s'appelait alors la Coquille, appareilla pour son premier tour du monde en 1822, sous le commandement du lieutenant de vaisseau Duperrey. Elle revint en mars 1825 après un parcours de 50 000 milles (près de 100 000 km) avec une documentation scientifique impressionnante. En 1826, Jules Sébastien César Dumont d'Urville appareilla à son tour sur la Coquille devenue l'Astrolabe pour un second tour du monde. La moisson scientifique fut tout aussi fructueuse : l'expédition releva plus de 4000 kilomètres de côtes dans le Pacifique et découvrit ou rectifia la position de plus de 150 îles, sans parler des immenses collections de roches et de plantes.

Lors de son séjour en Tasmanie, Dumont d'Urville apprit qu'un capitaine anglais, Peter Dillon, avait retrouvé la trace de La Pérouse. Il se rendit donc à Vanikoro, recueillit quelques épaves qui confirmèrent la tragédie à laquelle avait succombé son illustre prédécesseur et éleva un monument à sa mémoire.
De 1837 à 1840, avec l''Astrolabe et la Zélée, Dumont d'Urville explora une partie de l'Antarctique et découvrit une terre, qu'il appela Adélie en l'honneur de sa femme.
Ce grand marin, qui avait fait trois fois le tour du monde, mourut en 1842 dans l'un des premiers accidents de chemin de fer, sur la ligne Paris-Versailles.

L'Astrolabe dans l'Antarctique en 1838

Le pont de l'Astrolabe : maquette en construction

L'Astrolabe ; un profil de corvette très habituel

La personnalité de Dumont d'Urville est très controversée. Entré à l'Ecole Navale de Brest à l'âge de dix-sept ans, l'élève est jugé solitaire, méprisant, mais très studieux et étranger à tous les plaisirs de la société.
Jusqu'en 1818, il attend à Toulon son premier embarquement et en profite pour acquérir un savoir véritablement encyclopédique. D'une mémoire phénoménal, doué pour les langues, il maîtrise la botanique, l'astronomie, l'entomologie et parle couramment l'anglais, l'allemand, l'italien, le russe, le chinois et l'hébreu, sans parler du grec et du latin. Grâce à son génie des langues et aux études comparatives qu'il mena sur les dialectes en usage dans le Pacifique, d'Urville put, au cours de ses voyages, se faire comprendre dans un grand nombre de dialectes polynésiens et mélanésiens. Ainsi il devina les quatre grands groupes du peuplement de l'Océanie et divisa cette vaste partie du monde en autant de catégories fondées sur les caractéristiques de ses habitants.

Dumont d'Urville

Malheureusement cette immense érudition le rendit pendant toute sa vie arrogant, très imbu de lui-même, incapable de percevoir les qualités de ses subordonnés. Le succès de son premier voyage scientifique et la gloire qu'il en récolta accentuèrent encore son sentiment d'être supérieur au commun des mortels.
A l'opposé, Dumont d'Urville a laissé le souvenir d'un chef d'expédition toujours soucieux du bien-être de ses hommes, de leurs maladies (le scorbut frappait toujours).
Il fut un commandant d'une grande tenue morale (à Tahiti, il était bien le seul Occidental à refuser les avances des femmes) et intraitable dès que la discipline ou la sécurité de son vaisseau était en jeu. Comme La Pérouse ou le commodore Anson, il savait qu'on ne conduit pas un navire d'exploration à l'autre bout du monde sans se faire apprécier de son équipage en lui montrant que rigueur et, parfois, sévérité sont indispensables à la sécurité de tous.

Deux photos d'une maquette de l'Astrolabe en teck ciré et vieilli (ci-dessus et à droite)

La poupe de l'Astrolabe ne montre aucune recherche architecturale particulière. Au début du XIXe siècle, les chantiers navals ont peu à peu abandonné les poupes rutilantes de sculptures et de motifs artistiques qui demeuraient la marque des vaisseaux de ligne. On les rencontrait aussi, à un degré moindre, sur les frégates et les corvettes, comme, par exemple, sur la Flore lancée en 1768. Dès lors, on construisit dans la sobriété, sans s'interdire pour autant une certaine beauté d'ensemble.

La proue de l'Astrolabe est ornée d'un lion assis. Le lion, et notamment le lion couché, était une figure de proue très courante. L'Angleterre l'adopta pour tous ses vaisseaux de guerre à partir de la seconde moitié du XVIIIe siècle. Sculpture faite à la main dans le bois de natte.

La poupe de l'Astrolabe : un exemple de simplicité au début
du XIXe siècle.

A l'opposé, on pourra admirer la reproduction de la poupe du De Zeven Provincien, vaisseau amiral de la flotte des Provinces-Unies au cours de la deuxième guerre anglo-hollandaise (1665-1667). L'époque est à la grandiloquence, au faste, à l'orgueil des princes qui veulent voir leur puissance et la grandeur de leur Etat s'afficher sur les mers.
Dès le règne de Louis XIV, sur les instructions de Colbert, la France se lance, devant l'Espagne et l'Angleterre, dans la construction de poupes somptueuses. Bien sûr, ces décorations coûtent cher et retardent les chantiers. La France ne mettra un terme à cette passion artistique dispendieuse qu'au cours du Premier Empire.

La Flore vue depuis la poupe

La poupe du De Zeven Provincien : une recherche esthétique
autant qu'une marque de prestige. C'était le vaisseau amiral de
Michel de Ruyter, commandant de la flotte des Provinces-Unies,
pendant la deuxième guerre anglo-hollandaise (1665-1667)

 
Astrolabe