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Page créée en oct. 2018
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'Les neuf choeurs des esprits célestes' de Louis Licherie de Beurie, détail

L'église Saint-Étienne-du-Mont fait partie intégrante de l'histoire de l'abbaye Sainte-Geneviève (aujourd'hui le lycée Henri IV). L'abbaye tire son origine de l'église des Saints Apôtres Pierre et Paul fondée par Clovis, vers 508, au sommet de ce qui est à présent la montagne Sainte-Geneviève. L'abbaye abritait les reliques de la sainte et de Clovis et, à ce titre, elle devint le lieu de pèlerinage le plus important de la ville. Au début du XIIIe siècle, Philippe Auguste fait entreprendre la construction d'une nouvelle muraille pour ceinturer Paris. Le quartier de l'abbaye, qui s'étend justement près de la muraille, en est sécurisé ; sa population s'accroît. Conséquence : l'église abbatiale, qui sert aussi pour les paroissiens, ne suffit plus. Une église paroissiale est alors construite, dédiée à saint Étienne. Elle est intégrée dans le cloître et les moines conservent la haute main sur sa gestion.
À la fin du XVe siècle, devenue à son tour insuffisante, elle est remplacée par un édifice plus vaste. Les travaux, menés sous la direction de Jean Turbillon, commencent par le chœur. Puis ce chœur s'étoffe de sept chapelles rayonnantes que de riches familles du quartier se font bâtir. La construction complète de l'église va s'échelonner sur plus d'un siècle (de 1492 à 1626) et traverser les guerres de Religion. Parfois elle ralentira par manque de fonds. Les maîtres maçons Nicolas Beaucorps, son fils Antoine, puis Pierre Nicolle se succèdent à la tête du chantier. La nouvelle église, qui abrite des reliques de saint Étienne, est accolée à l'abbatiale (voir le dessin d'époque). Les moines génofévains la regardent toujours comme partie intégrante de leur fief (le curé de l'église est un membre de leur communauté). Mais, au fil du temps, cette attache va s'atténuer. Au début du XVIIe siècle, la fabrique fait construire, au chevet de l'église, le cloître des Charniers qui accueille encore actuellement la galerie des vitraux des Charniers qui comptent parmi les plus beaux de Paris.
Malgré une construction du chœur, puis de la nef, étalée sur une trentaine d'années, l'architecture de l'édifice offre une remarquable uniformité, bien visible au niveau des piles et de la voûte. Le style architectural gothique est enrichi d'une ornementation Renaissance, dans un mariage très harmonieux. Un magnifique jubé (le seul qui reste à Paris) coupe l'édifice en deux et en fait son principal atout artistique (ce qui lui vaut la visite de nombreux touristes). Dans les premières décennies de son existence, l'église va s'embellir grâce au mécénat privé et aux dons des confréries : chapelles, tableaux, vitraux et autels se multiplient. Pour ce qui est de la luminosité, dont l'intensité frappe le visiteur dès son entrée, la fabrique imprime sa volonté : sauf exceptions, les baies de l'étage médian recevront du verre blanc. Et ce choix est une réussite : en dépit de nombreuses verrières historiées et colorées, Saint-Étienne-du-Mont baigne dans la lumière. Le XVIIIe siècle et ses grands programmes architecturaux ne modifient pas l'église : son aménagement peu commun la protège et le quartier n'est guère dynamique.
La Révolution dépouille entièrement l'édifice. Ne restent que le jubé, l'orgue de tribune et la chaire à prêcher. L'église devient temple de la Piété filiale, à l'usage d'un nouveau culte : la théophilanthropie. Cependant, dès juillet 1795, les prêtres catholiques reviennent et partagent l'église avec les théophilanthropes. En 1807, l'église abbatiale Sainte-Geneviève, dévastée par le pillage, est détruite. Seul subsiste son clocher (actuellement tour Clovis). Les bâtiments du monastère vont devenir le lycée Henri IV. Quant au Panthéon, bâti sous Louis XV pour remplacer l'église abbatiale, la Révolution en avait fait un édifice consacré aux gloires de la France.
Sous le Premier Empire, l'ameublement va s'enrichir ; des tableaux anciens décorent les chapelles (voir l'encadré sur les œuvres d'art). Au cours du XIXe siècle, les dons des paroissiens redonnent vie à son ornementation. Sous Napoléon III, l'architecte Victor Baltard (1805-1874) construit la chapelle des catéchismes (1857).
Ce site consacre trois pages à l'église Saint-Étienne-du-Mont et les vitraux y sont largement représentés. Page 1 : la nef, son ornementation et ses verrières ; page 2 : le chœur et ses grandes verrières ; page 3 : les vitraux des charniers et la chapelle des catéchismes.

Vitrail du Très-Saint-Nom-de-Jésus, XVIe siècle, détail
Vue d'ensemble de la nef et du chœur de Saint–Étienne–du–Mont
Vue d'ensemble de la nef et du chœur de Saint-Étienne-du-Mont.
Le jubé de Saint-Étienne-du-Mont est le seul qui subsiste dans les églises de Paris.
La façade occidentale de l'église a été érigée de 1610 à 1622
La façade occidentale de l'église a été érigée de 1610 à 1622.
Elle a été restaurée par l'architecte Baltard sous le Second Empire. Il fit refaire toute la statuaire.
La façade se présente légèrement de biais par rapport à l'axe de la nef (voir le plan).
Le premier niveau de la façade coiffé de son fronton triangulaire orné d'une Résurrection
Le premier niveau de la façade est coiffé d'un fronton triangulaire orné d'une résurrection.
Statues et bas-reliefs sont du XIXe siècle.

Lors des siècles passés, l'ordonnancement architectural de la façade a été décrié. On se demande un peu pourquoi. Est-ce l'impression donnée par le fronton curviligne du deuxième niveau qui surmonte le fronton triangulaire du premier ? Ou le manque de force architecturale des élévations des bas-côtés ?

La «Résurrection du Christ» date de 1862. Œuvre d'Auguste-Hyacinthe de Bay (1804-1865)
La «Résurrection du Christ» date de 1862. Œuvre d'Auguste-Hyacinthe de Bay (1804-1865).
Fronton triangulaire du premier niveau de la façade occidentale.
Le deuxième niveau de la façade et le fronton du premier niveau
Le deuxième niveau de la façade et le fronton du premier niveau.
Bas-reliefs et statues sont du XIXe siècle.
La rose est encadrée par une Annonciation : l'ange Gabriel et la Vierge.
Le chevet de Saint-Étienne-du-Mont
Le chevet de Saint-Étienne-du-Mont.
Depuis la rue, il n'est pas possible de voir le chevet de face.
L'église paroissiale Sainte-Étienne-du-Mont et l'église abbatiale Sainte-Geneviève
L'église paroissiale Sainte-Étienne-du-Mont et l'église abbatiale Sainte-Geneviève.
L'abbatiale est détruite de 1802 à 1807. Seul subsiste son clocher : la tour Clovis actuelle.

La façade occidentale. Ce n'est qu'en 1610 que le conseil de fabrique de Saint-Étienne arrêta les dispositions définitives de la façade. Dans les faits, ce fut la première grande façade à l'antique de la capitale. Le dessin était signé de l'architecte Claude Guérin et la construction s'étala de 1611 à 1622. La première pierre fut posée par la reine Margot le 2 août 1610. Celle-ci donna en outre mille écus à la fabrique pour les travaux. Malgré ce don, les sources de financement manquaient. Les paroissiens préféraient en effet offrir des vitraux (où ils pouvaient être représentés en tant que donateurs) plutôt que d'œuvrer, quasi anonymement, à l'élévation d'une maçonnerie.
Le style architectural de la façade, assez éclectique, reste harmonieux. Le premier niveau forme l'entrée d'un temple grec. Deux paires de colonnes rustiques cannelées, à chapiteaux corinthiens encadrent un portail, le tout est surmonté d'un fronton triangulaire. Le deuxième niveau présente une rose coiffée d'un fronton curviligne. Ces variations rappellent l'architecture romaine. Enfin, le troisième niveau, qui termine l'élévation, est un pinacle gothique orné d'une rose et d'un vase Renaissance enrichi d'un angelot.
La façade a été critiquée parce qu'elle torture les règles académiques et le modèle romain. Certains puristes la jugent «chaotique». De plus, la comparaison avec celle de Saint-Gervais, conçue par Salomon de Brosse vers 1615 et qui représente le type même de la façade à l'italienne à Paris, la dessert fortement. En fait, dans leur ouvrage sur Saint-Étienne-du-Mont paru aux éditions Picard, Étienne Hamon et Françoise Gatouillat invitent le visiteur à voir les choses d'une autre manière : la façade traduit le renouveau du dynamisme dans l'architecture religieuse au retour du roi Henri IV dans sa capitale, en 1594. La paix retrouvée déclenchait l'ambition des créateurs. Sans oublier que Saint-Étienne-du-Mont, édifiée sur la colline Sainte-Geneviève, domine Paris et qu'elle côtoie l'illustre église abbatiale Sainte-Geneviève.
En 1860, Victor Baltard entreprit la restauration de la façade en en respectant en grande partie la structure primitive. La Révolution avait brisé toutes les statues. Baltard les fit reconstruire en renouvelant leur iconographie. L'architecte donna d'ailleurs dans la surenchère : il multiplia les statues et les bas-reliefs, accentuant ainsi son caractère baroque, qui était à l'origine plus discret.
Source : Saint-Étienne-du-Mont par Étienne Hamon & Françoise Gatouillat, Éd. Picard, 2016.

Le fronton curviligne est sculpté aux armes de France (les lis) et de Navarre (la chaîne)
Le fronton curviligne est sculpté aux armes de France (les lis) et de Navarre (la chaîne)
(deuxième niveau de la façade).
Sainte Geneviève dans une niche
Sainte Geneviève,
dans une niche de la façade,
par Pierre Hébert (1804-1869).
Saint Étienne dans une niche
Saint Étienne,
dans une niche de la façade,
par Joseph-Marius Ramus
(1805-1888).
La Vierge de l'Annonciation
La Vierge de l'Annonciation,
au deuxième niveau de la façade,
par Joseph Félon (1818-1896).
Le Panthéon vu de l'église
Le Panthéon vu de l'église Saint-Étienne-du-Mont.
«Lapidation de saint Étienne» par Gabriel–Jules Thomas (1824–1905)
«La Lapidation de saint Étienne» par Gabriel-Jules Thomas (1824-1905).
Tympan du portail central.

Le Panthéon. Au XVIIIe siècle, l'édifice a été construit en tant qu'église pour abriter la châsse de sainte Geneviève. Il a été achevé en 1780. La Révolution a transformé l'église en monument national pour honorer les gloires de la France.

LA NEF, LE TRANSEPT ET LEURS CHAPELLES LATÉRALES
Élévations sud et chœur
L'élévation sud et le chœur.
L'église Saint-Étienne-du-Mont, avec la cathédrale Notre-Dame et le Sacré-Cœur de Montmartre, est l'un des édifices religieux les plus visités de Paris.

La nef de Saint-Étienne-du-Mont n'a pas sa pareille dans la capitale. Mis à part le jubé, qu'elle est la seule église parisienne à conserver, toute son originalité architecturale - et qui frappe le visiteur - est la présence d'une coursive scandée de balcons circulaires qui relie à mi-hauteur les hautes piles de la nef. La balustrade de pierre, en coupant la hauteur de la nef en deux, brise l'élancement de l'élévation. Sans cette coursive, on imagine aisément l'effet que produiraient les piles nues qui séparent le vaisseau central des bas-côtés. Certes, l'impression d'élancement serait accentuée, mais la froideur envahirait l'espace. À l'origine, la coursive servait, lors des fêtes, à accrocher des tapisseries illustrant la vie de saint Étienne. Elle barre malheureusement aussi la vue si l'on veut observer avec assez de recul les verrières qui sont à mi-hauteur...
Si l'architecture de Saint-Étienne-du-Mont relève du gothique flamboyant (voûtes d'ogives, clés pendantes), l'ornementation de l'église est celle de la Renaissance italienne, ce que les colonnes cylindriques, l'arcature en plein cintre, les nombreux putti et les têtes d'angelots rappellent abondamment.
L'autre point qui frappe le visiteur est la très grande luminosité de la nef. Les baies sont disposées sur trois niveaux et beaucoup d'entre elles ne reçoivent que du verre blanc, notamment celles à mi-hauteur. Les autres sont enrichies, dans leur grande majorité, de verrières Renaissance qui font toute la richesse artistique de l'église.
La croisée possède une magnifique clé de voûte Renaissance qui fait l'objet de plusieurs images plus bas.

Le bas–côté sud et ses balcons
Le bas-côté sud et les balcons de la coursive.
Plan de l'église Saint-Étienne-de-Mont
Plan de l'église Saint-Étienne-de-Mont.
«Le Baptême du Christ» par Thomas d'Aligny, 1850
«Le Baptême du Christ» par Théodore Caruelle d'Aligny, 1850.
Peinture murale dans la chapelle des Fonts baptismaux.

Plan. Le visiteur ne doit pas se contenter de voir l'église car il y a plus à admirer. L'ancien cimetière fait place aujourd'hui à trois galeries (sud, est et nord) et à la chapelle des catéchismes.
La galerie sud accueille la réception où l'on peut se procurer livres et cartes postales. On peut aussi y voir un petit vitrail Renaissance. La galerie Est expose les vitraux des charniers. Enfin, si vous avez de la chance, la porte de la galerie Nord sera peut-être ouverte. Vous pourrez y contempler cinq autres vitraux Renaissance. Certains d'entre eux sont donnés à page consacrée à la chapelle des catéchismes.

La voûte de la nef, de la croisée et du chœur
La voûte de la nef, de la croisée et du chœur.

Bien que la construction du chevet et de la nef se soit
étalée sur plus de trente ans,
la voûte est remarquable par son uniformité.
Le retable de la chapelle des Fonts baptismaux
Le retable de la chapelle des Fonts baptismaux.
Bas-relief en marbre de la Vierge et l'Enfant sur le retable
Bas-relief en marbre de la Sainte Famille sur le retable (avant le XVIIe)
Chapelle des Fonts baptismaux.

Chapelle des Fonts. La cuve baptismale d'origine a été détruite en 1793. Celle que l'on voit est une vasque de marbre posée sur une console de pierre du XVIIIe siècle. La statue est un Saint Jean-Baptiste enfant de Joseph-Marius Ramus.

Chapelle des Fonts baptismaux
Chapelle des Fonts baptismaux, partie ouest.
«Les neuf chœurs des esprits célestes» de Louis Licherie de Beurie (1629–1687)
«Les neuf chœurs des esprits célestes»
Tableau de Louis Licherie de Beurie (1629-1687).
Chapelle du Saint-Sépulcre et sa Mise au tombeau du XVIe siècle
Chapelle du Saint-Sépulcre et sa Mise au tombeau du XVIe siècle.

La chapelle du Saint-Sépulcre. Donnée dans l'image ci-dessus, elle abritait un passage qui faisait communiquer la nef de Saint-Étienne avec celle de l'abbatiale Sainte-Geneviève.
Le nom de Saint-Sépulcre vient à l'évidence de la grande Mise au tombeau qui ne laisse aucune place pour un autel. Cette œuvre du XVIe siècle a été installée en 1825, après son acquisition par le curé de l'église. Les huit grandes statues qui la composent ont été commandées en 1539 par Yolande Bonhomme, veuve du libraire Thielman Kerver. La famille Kerver possédait une chapelle dans l'église Saint-Benoît-le-Bétourné (disparue depuis). Les personnages étaient peints dans des rehauts de couleurs et d'or, aujourd'hui réduits à l'état de traces. On n'a aucune certitude sur le sculpteur, mais l'historien Guy-Michel Leproux propose Lorenzo Naldini, artiste florentin installé à Paris en 1528.
Le vitrail de cette chapelle (baie 24) n'a guère d'intérêt. Il réunit des débris de vitraux du XVIe siècle. Au tympan, on y voit les restes d'un Jugement dernier.
Source : Saint-Étienne-du-Mont par Étienne Hamon & Françoise Gatouillat, éditions Picard, 2016.

«Charles Borromée distribuant des aumônes»
«Charles Borromée distribuant des aumônes»
Tableau de Quentin Varin, 1627.
«Le Martyre de saint Jean l'Évangéliste», anonyme XVIIe siècle
«Le Martyre de saint Jean l'Évangéliste»
Tableau anonyme, XVIIe siècle.
Baie 32, Christ en croix, début du XVIIe siècle, chapelle des Fonts baptismaux
Christ en croix, début du XVIIe siècle
Baie 32 dans la chapelle des Fonts baptismaux.

Les œuvres d'art. Grâce aux documents et aux marchés du XVIe siècle que nous conservons, nous savons que l'église Saint-Étienne-du-Mont disposait de nombreux ornements, notamment dans les chapelles. La Révolution l'a dépouillée de tout, à l'exception du jubé, de l'orgue et de la chaire à prêcher. Autels, marbres et œuvres d'art avaient disparu. Avec le Concordat, l'église fut rouverte au culte, mais elle était à présent propriété de l'État. Celui-ci devait veiller à son entretien et avait la haute main sur son ornementation. On sait que le Premier Consul (le général Bonaparte), soucieux de ramener la paix de l'Église, fut très sensible à la question. Il initia une très large opération de reconstitution des ornements dans la quarantaine de paroisses parisiennes qui subsistait. En 1806, puis en 1811, l'État impérial répartit, de manière aléatoire, deux cent cinquante-cinq tableaux anciens du musée Napoléon. Une bonne partie de ces toiles provenait évidemment d'églises détruites. À ce titre, on trouve à Saint-Étienne Les neuf chœurs des esprits célestes de Louis Licherie de Beurie (donné ci-contre), auparavant à l'église des Pères de Saint-Lazare, ou encore La Charité de saint Charles de Borromée de Quentin Varin qui se trouvait à Saint-Jacques-de-la-Boucherie. Les dons privés venant de hauts prélats du clergé se multiplièrent aussi. Ainsi, La Chute de la manne de Jean-Baptiste de Champaigne fut offerte (avec d'autres tableaux) en 1811 par le cardinal Fesch, oncle de l'empereur, grand aumônier de France et archevêque de Lyon. En 1803, ce sont les vitraux Renaissance des charniers qui retrouvèrent leur place.
Une politique d'enrichissement de l'église en œuvres d'art vint aussi d'une vaste création contemporaine. Sous l'Empire, les paroissiens contribuèrent à la création du maître-autel et des autels secondaires en marbre. De la Restauration au Second Empire, les commandes publiques prirent le relais. Les créations étaient d'abord exposées au Salon officiel, puis attribuées à un édifice religieux. Il leur arrivait aussi d'être captées par l'État pour ses collections nationales.
Il faut s'arrêter un instant sur le tableau donné juste en haut, à droite : La Vierge à l'Enfant entre saint Pierre et sainte Lucie de Syracuse. C'est une peinture sur bois de Pier Ilario Mazzola, datée de 1518. Les sources indiquent qu'elle a été enlevée à l'église Sainte-Lucie de Parme en 1803. Elle fait donc partie des très nombreuses œuvres d'art prises par les armées françaises lors des conquêtes révolutionnaires et napoléoniennes. Et elle n'a pas été rendue après la chute de l'Empire.
Rappelons ici les principes qui guidèrent la gestion des œuvres d'art après la chute de Napoléon Ier. Lors du Congrès de Vienne, avant les Cent-Jours, la France eut le droit de conserver toutes les œuvres d'art que les armées de la Révolution, du Directoire, du Consulat et de l'Empire avaient saisies dans les palais et les églises d'Europe (les musées n'existaient pas encore). Après les Cent-Jours, les têtes couronnées du Congrès, excédées, décidèrent de frapper fort : ordre fut donné à la France de rendre aux pays spoliés toutes les œuvres d'art saisies, à l'exception de celles qui seraient déjà exposées dans les églises. L'église Saint-Eustache possède une de ces rares toiles : Tobie et l'ange du peintre italien Santi di Tito (1536-1603). Il est vraisemblable que la peinture sur bois de Mazzola fait aussi partie de ce lot.
Source : Saint-Étienne-du-Mont par Étienne Hamon & Françoise Gatouillat, éditions Picard, 2016.

«Vierge et Enfant Jésus, saint Pierre et sainte  Cécile» de Mazzola, XVIe siècle
«La Vierge à l'Enfant entre saint Pierre
et sainte Lucie de Syracuse»
Peinture sur bois de Pier Ilario Mazzola, 1518.
Enlevée en 1803 à l'église Sainte-Lucie de Parme.
«Vierge et Enfant Jésus, saint Pierre et sainte  Cécile» de Mazzola, XVIe siècle
«Calvaire», anonyme, XVIIe siècle.
Aristote se tient aux côtés de la Vierge, tandis que saint Jean est suivi de Louis XIII et de saint Louis.
Ce tableau veut illustrer le lien indéfectible entre la dynastie royale et la religion catholique.
Chapelle du Saint-Sépulcre.
«Les neuf chœurs des esprits célestes» de Louis Licherie de Beurie (1629–1687), détail
«Les neuf chœurs des esprits célestes» de Louis Licherie de Beurie (1629-1687), détail.
La Mise au tombeau dans la chapelle du Saint-Sépulcre
La Mise au tombeau du XVIe siècle dans la chapelle du Saint-Sépulcre.
La Vierge et saint Jean
La Vierge et saint Jean.
Détail de la Mise au tombeau (vers 1540).
BAIE 28 - LE VITRAIL DES CONVIÉS
Baie 26, la Parabole des conviés aux noces, 1568
LA PARABOLE DES CONVIÉS AUX NOCES, 1568 (baie 28)
Chapelle du Crucifix.
«Le Jugement dernier» attribué à Martin Fréminet, 1605
«Le Jugement dernier» attribué (peut-être à tort) à Martin Fréminet, 1605.
Chapelle Saint-Bernard.
Les historiens s'accordent pour voir un moine de l'abbaye Sainte-Geneviève
dans le donateur en bas à gauche. Le tableau vient vraisemblablement de cette abbaye.
Deux vertus théologales sur la cuve de la chaire à prêcher
La Force (vertu cardinale) et la Charité (vertu théologale) sur la cuve de la chaire.
Dans le bas-relief, saint Étienne est appréhendé par ses persécuteurs.
Vitrail, la Parabole des conviés aux noces, 1568, détail
LA PARABOLE DES CONVIÉS AUX NOCES
Détail de la baie 28.
Un homme vient de se marier et ne peut participer au banquet.

Un pauvre (qui n'a pas d'obligation) vient participer au banquet --»»
Vitrail, la Parabole des conviés aux noces, 1568, détail
La Parabole des conviés aux noces
Détail de la baie 28.

Baie 28, le vitrail des conviés. Daté de 1568, ce très beau vitrail illustre une parabole peu connue. Dans la lancette centrale, un seigneur (qui symbolise le Père céleste) appelle ses amis fortunés à un banquet (qui consiste en fait à célébrer l'Eucharistie). Chacun trouve une excuse pour ne pas venir : l'un se marie, un autre veut voir la maison qu'il vient d'acquérir, un troisième vient d'acheter une paire de bœufs. Ces scènes figurent dans la lancette de gauche. Ce sont donc les pauvres qui vont participer au banquet. Moralité de la parabole : les pauvres, ne possédant rien, n'ont pas d'obligation et sont ainsi ouverts à la parole du Christ.
Les panneaux inférieurs ont été renouvelés en 1887.

«Le Jugement dernier», détail
«Le Jugement dernier», détail.
Sainte Élisabeth de Hongrie faisant l'aumône
Sainte Élisabeth de Hongrie faisant l'aumône
Baie 30, vers 1560.
LA CHAIRE À PRÊCHER
La chaire à prêcher de Germain Pillon, 1652
La chaire à prêcher
du maître menuisier Germain Pillon, 1651.
L'ange trompettiste sur l'abat-son
L'ange trompettiste sur l'abat-son
de la chaire à prêcher.
Samson tenant la cuve de la chaire à prêcher
Samson tenant la cuve de la chaire à prêcher.

La chaire à prêcher.
Épargnée par la Révolution, la chaire est l'œuvre du maître menuisier Germain Pillon. Elle est datée de 1651. Les sources rapportent que la fabrique fit appel à trois de ses confrères, fin 1651, pour expertiser son œuvre. À la suite de quoi, elle lui régla la somme de 4800 livres. Tous les anciens historiens attribuent l'ensemble des sculptures et des bas-reliefs à Claude Lestocard, bien qu'aucun document ne soit là pour nous en convaincre. Lestocard aurait ainsi réalisé le Samson, mué en atlante, qui supporte la chaire ainsi que les sept Vertus théologales et cardinales. On lui devrait aussi les bas-reliefs sur la cuve et le manteau de l'escalier : ce sont d'abord six médaillons aux effigies des évangélistes, de saint Jérôme et de saint Augustin, puis des panneaux illustrant des épisodes de la vie de saint Étienne, dessinés par Laurent de la Hyre.
Source : Saint-Étienne-du-Mont par Étienne Hamon & Françoise Gatouillat, éditions Picard, 2016.

L'Espérance, la Tempérance, la Force et la Charité sur la cuve de la chaire à prêcher
L'Espérance, la Tempérance, la Force et la Charité sur la cuve de la chaire à prêcher.
L'élévation nord dans la nef
L'élévation nord dans la nef.

L'ornementation de la nef et des arcades est assez simple. Les piles cylindriques ne possèdent aucune colonnette engagée comme on peut en voir dans le style gothique. Nous sommes ici dans le style Renaissance avec sa suite d'arcades en plein cintre, ornées d'une double moulure assez pauvre. La coursive à mi-hauteur habille l'ensemble. À la retombée des voûtes, l'architecte de la nef a néanmoins enrichi quelque peu la nudité des supports. L'image ci-dessus à droite en donne une illustration. Le double liseré qui joint les retombées des voûtes se transforme en une petite corniche en arrivant sur la colonne. L'intrados de cette corniche reçoit une élégante bague creusée d'une série d'oves (photo ci-contre). Cette ornementation se retrouve au niveau de la deuxième bague, à la retombée de l'arcature du second niveau. Dans le chœur, ces colonnes qui descendent des voûtes sont laissées totalement nues. Rappelons que la nef a été construite deux décennies après le chœur.

L'ornementation des bagues sur un pilier de la nef
L'ornementation des bagues
sur un pilier de la nef.
«La Charité» par Charles–René Laitié, 1824
«La Charité»
par Charles-René Laitié, 1824.
Chapelle de l'Immaculée-Conception
«L'Éducation de la Vierge» par Guillaume le Vieil, panneau peint vers 1712 pour l'église Saint–Roch, vitrail de la baie 22
L'ÉDUCATION DE LA VIERGE par Guillaume le Vieil (baie 22)
panneau peint vers 1712 pour l'église Saint-Roch.
Bague ornée d'oves sur la partie haute des colonnes de la nef
Bague ornée d'oves sur la partie haute des colonnes de la nef.
«La Chute de la manne» de Jean–Baptiste de Champaigne, vers 1662
«La Chute de la manne» de Jean-Baptiste de Champaigne, vers 1662.
Bas-côté nord vu depuis le jubé
La base du clocher vue depuis le bas-côté nord de la nef.
Derrière les deux ouvertures du premier étage se trouve une salle qui servait
aux réunions des marguilliers aux XVIIe et XVIIIe siècles.
«La Déploration sur le corps du Christ» par Amélie Legrand de Saint–Aubin, 1827
«La Déploration sur le corps du Christ» par Amélie Legrand de Saint-Aubin, 1827.

Le clocher. Sa base est le seul vestige du XVe siècle. En 1624, il a subi un rehaussement qui a respecté son allure générale : élancée et étroite. Dans la photo ci-contre, la pile sud qui le soutient accuse un diamètre trois fois supérieur à celui des autres piles (voir plan). Ce clocher a sans cesse subi le regard inquisiteur des moines de l'abbaye Saint-Geneviève. En aucun cas il ne devait prendre le dessus, par sa masse et sa hauteur, sur celui de l'église abbatiale. Pas question de le surmonter d'une flèche ni de grossir son gabarit. Ainsi limité, on ne pouvait augmenter le nombre de cloches et leur taille : elles ne résonneraient pas plus loin que celles de l'abbatiale !

BAIE 115 - VITRAIL DE L'APOCALYPSE
Vitrail de la baie 115 : L'Apocalypse, 1614
L'APOCALYPSE, 1614 (baie 115)
(Le Père céleste du haut est du XIXe siècle.)
Détail du vêtement d'un roi qui adore la Bête. Début du XVIIe siècle
Détail du vêtement d'un roi qui adore la Bête (APOCALYPSE)
L'Éducation de la Vierge dans le tympan du vitrail de l'Apocalypse (baie 115)
L'Éducation de la Vierge entourée de saint Jean avec le calice et de saint Jean écrivant son évangile.
Tympan du vitrail de l'APOCALYPSE (baie 115).
C'est l'une des rares parties de ce grand vitrail à être entièrement du début du XVIIe siècle.

Baie 115. Vitrail de l'Apocalypse. Ce très beau vitrail Renaissance mérite quelques développements. Il se trouve que son histoire est connue grâce aux registres de délibérations de la paroisse conservés aux Archives nationales. La construction de Saint-Étienne-du-Mont a toujours été mise en péril par le manque de fonds. Vers 1608-1609, le projet d'une nouvelle façade prend forme. Il faut redoubler les quêtes et les appels aux dons. C'est dans ce contexte qu'en 1609 un marchand de vins et ancien marguillier, Jean le Juge, propose d'offrir un vitrail à l'église pour orner le bas-côté nord. Le chapitre essaya de l'en dissuader : financer la construction du portail ou la fonte des cloches était plus utile. Cette noble assemblée fit aussi appel à l'argument de la luminosité : mieux valait laisser du verre blanc pour éclairer la nef que l'obscurcir par un vitrail coloré. Mais, pour notre marchand de vins, on peut penser que les deux financements étaient bien différents. Sur un vitrail, l'habitude était de s'afficher en prière avec femme et enfants dans le registre inférieur. C'était voyant, reconnaissable et prestigieux pour le donateur. À l'inverse, il était difficile de laisser une marque aussi visible dans une élévation de pierres, et pis dans une fonte de cloches ! Le chapitre eut beau lui proposer en compensation de placer ses armoiries dans le bas de la vitrerie, rien n'y fit. Jean le Juge ne céda pas et obtint gain de cause.
Le vitrail illustre les grands thèmes de l'Apocalypse. Dans la partie haute, le Père céleste tient le livre des sept sceaux. L'agneau (c'est-à-dire Jésus-Christ) a ouvert le livre et les calamités commencent à se répandre, apportées par les quatre cavaliers (partie médiane). Les vingt-quatre vieillards célèbrent la gloire du Créateur. Des anges penchent leurs coupes dans les puits et les sources et y versent la colère divine. Toujours dans la partie médiane, les peuples et leurs rois adorent la Bête. Au niveau inférieur, le donateur en prière et sa nombreuse famille jettent un regard (de fierté?) vers l'observateur. En voyant ce registre, on comprend que Jean le Juge ne pouvait pas se contenter d'inscrire simplement ses armoiries dans une vitrerie...
Que subsiste-t-il réellement de l'époque Renaissance dans cette verrière? Peu de choses  : d'une part, la magnifique rangée des donateurs (presque entièrement du début du XVIIe siècle) ; d'autre part, le tympan (scène de l'Éducation de la Vierge entourée de deux saint Jean). Le reste a été très restauré au XIXe. Le Père céleste et toute la lancette centrale qui l'entoure sont modernes. Parmi les vieillards qui adorent le Père et les rois qui adorent la Bête, certaines têtes et certains vêtements sont de la Renaissance. Quant à la Bête tout en couleurs, elle semble venir en majorité de la Renaissance.
Source : Vitraux parisiens de la Renaissance édité par La Délégation à l'Action artistique de la ville de Paris, 1993.

Vue partielle des donateurs dans le vitrail de l'Apocalypse
La famille de Jean le Juge : Vue partielle des donateurs dans le vitrail de l'APOCALYPSE (1614).
Partie presque entièrement du début du XVIIe siècle.
Les donateurs du vitrail de l'Apocalypse : la mère
Les donateurs du vitrail de l'Apocalypse : la mère.
Les donateurs du vitrail de l'Apocalypse : le père
Les donateurs du vitrail de l'Apocalypse : le père.

La Bête du vitrail de l'Apocalypse de Saint-Étienne-du-Mont, par sa petite taille, rappelle un peu la tarasque traditionnellement tenue en laisse par sainte Marthe (voir la tarasque du musée d'Art et d'Histoire de Chaumont). Pour avoir d'autres illustrations de la Bête de l'Apocalypse, on pourra se reporter au vitrail du Jugement dernier à l'église Saint-Nizier de Troyes. Un vitrail contemporain à l'église Saint-Pierre de Caen propose un dessin assez simple, mais suggestif.

La Bête dans le vitrail de l'Apocalypse
La Bête dans le vitrail de l'APOCALYPSE.
Les anges versent la colère divine dans les puits et les sources.
«Madeleine contemplant le Christ en croix», anonyme, XVIIe  siècle
«Madeleine contemplant le Christ en croix»
Tableau anonyme, XVIIe siècle.
Chapelle Saint-Louis
La chapelle Saint-Louis avec le buste de Pascal.
Les Vieillards dans le vitrail de l'Apocalypse
Les Vieillards dans le vitrail de l'Apocalypse.
Buste de Racine par J. Frère, 1899
Buste de Racine par J. Frère, 1899.
Chapelle de l'Ange gardien.
L'Arbre de Jessé (registre du bas) dans le vitrail de la baie 215
L'ARBRE DE JESSÉ (registre du bas), 1858, atelier Laurent Gsell (baie 215).
L'atelier n'a mis que peu de couleurs pour conserver le ton du vitrail de Marie, à côté (donné ci-dessous).
Buste de Pascal par J. Frère, 1899
Buste de Pascal par J. Frère, 1899.
Chapelle Saint-Louis.
La nef et l'élévation sud près de la croisée «La Vierge des Litanies» attribué à Nicolas Pinaigrier, vers 1586. Vitrail de la baie 213
LA VIERGE DES LITANIES (baie 213)
attribué à Nicolas Pinaigrier, vers 1586.

«««--- La nef et l'élévation sud près de la croisée.
Les baies en verre blanc, au niveau médian, sont en place depuis le XVIe siècle.

Les vitraux de l'église Saint-Étienne-du-Mont.
La vitrerie Renaissance est l'une des richesses de l'église. On y dénombre près de cinquante verrières anciennes, plus que n'importe quelle autre église de Paris. À Saint-Étienne-du-Mont, on peut partager en trois cette copieuse vitrerie : les vitraux du chœur ; ceux du transept et de la nef (chapelles et parties hautes) ; enfin ceux qui sont actuellement dans les trois galeries des Charniers, près de la chapelle des Catéchismes
Ce qui rend cette collection exceptionnelle est sa permanence historique. Dans le chœur, les fenêtres hautes ont gardé la totalité de leur vitrerie du XVIe siècle, alternant vitraux historiés et verres blancs bordés de rinceaux. Dans les parties hautes de la nef et du transept, c'est pratiquement aussi le programme primitif du XVIe siècle que l'on peut admirer. En revanche, ceux des chapelles ont connu quelques déboires. On y trouve des parties d'anciens vitraux (comme Sainte-Élisabeth de Hongrie dans une chapelle sud de la nef) ou des créations du XIXe siècle, dont certaines sont fort belles (voir le vitrail de la Cène de l'atelier Charles Champigneulle, daté de 1899, dans la chapelle du Sacré-Cœur). Enfin, les vitraux des charniers, de plus faible dimension et créés pour être vus de près, ont connu quelques vicissitudes (notamment à la Révolution), mais, dans leur majorité, ils ont regagné l'église au début du XIXe siècle.
La première campagne de vitrage concerne les baies du chœur (puisque celui-ci a été construit avec la nef). Nous sommes là dans les années 1540-1542. La seconde campagne a lieu quarante ans plus tard : les fenêtres hautes de la partie occidentale reçoivent leurs verrières entre 1586 et 1588. L'intervalle de temps assez court - deux à trois ans - de chacune des campagnes indique aisément, compte tenu de la surface à vitrer, que la fabrique à monopoliser le gratin des maîtres verriers parisiens à son seul profit pendant cette période.
Qui sont ces maîtres verriers ? La découverte récente de seize marchés dans les archives de la fabrique a clarifié la réponse à cette question et permis d'écarter définitivement des noms comme ceux de Claude Henriet ou d'Engrand Le Prince, une des gloires des vitraux Renaissance du Beauvaisis. Paris ne manquait pas

d'ateliers ni de maîtres verriers de première force. À côté d'artisans de moindre renommée, on note trois noms célèbres : Jean Chastellain et Nicolas Beaurain pour la première campagne, Nicolas Pinaigrier pour la seconde. Au tout début du XVIIIe siècle, bien que la mode du vitrail fût passée, Guillaume Le Vieil créa encore deux verrières pour l'église. Lui-même et son fils Pierre furent ensuite en charge de l'entretien des vitraux de Saint-Étienne-du-Mont, charge qui s'étala pratiquement jusqu'à la Révolution.
Par un habile équilibre entre les vitraux historiés et ceux en verre blanc (ce qui assurait une belle luminosité), l'église a pu passer le dangereux cap du XVIIIe siècle, un siècle bien souvent fatal à la vitrerie des églises trop sombres. Avec le recul, on peut même dire que Guillaume Le Vieil et son fils Pierre ont réalisé un excellent travail d'entretien tout au long du XVIIIe.
Qui a offert ces verrières? Assurément, pour les plus grandes, des confréries et des riches familles (comme le marchand de vins Jean le Juge qui offrit, vers 1610, le vitrail de l'Apocalypse). Celles des chapelles latérales l'ont aussi été par des particuliers habitant vraisemblablement la Montagne Sainte-Geneviève ou ses alentours. Quoique, dans ce cas, l'offre d'un vitrail, certes de plus petite taille, doit être pensée comme l'élément d'un don plus important : celui d'une chapelle et de sa décoration.
Au XIXe siècle, quelques dons de particuliers vinrent enrichir cette impressionnante collection dans les chapelles du chevet. Parmi ces vitraux, signalons l'intéressante création, datée de 1882, de l'atelier d'Édouard Didron dans la chapelle Sainte-Geneviève. Ce vitrail illustre une procession de la châsse de la sainte, telle qu'elle devait se dérouler avant la Révolution. L'atelier a utilisé un dessin du XVIIe siècle qui montre les églises Saint-Étienne et Sainte-Geneviève côte-à-côte.
Les trois pages consacrées à Saint-Étienne-du-Mont dans ce site présentent la quasi-totalité des vitraux Renaissance de l'église. En page 1, ceux de la nef ; en page 2, ceux du chœur ; en page 3, ceux des charniers.
Source : Saint-Étienne-du-Mont par Étienne Hamon & Françoise Gatouillat, éditions Picard, 2016.

Vitrail de la baie 216 : les Quatre Saints (fin du XVIe siècle)
Les QUATRE SAINTS (et les donateurs), 1586 (baie 216)
Ce sont les saints patrons de la famille Bouchinet (saint Nicolas, saint Jean-Baptiste, saint Olivier et sainte Agnès)
Vitrail de la baie 221 : La Résurrection du Christ (2e ou 3e quart  du XVIe siècle)
LA RÉSURRECTION DU CHRIST (baie 221)
(2e ou 3e quart du XVIe siècle).
Vitrail de la baie 220 : Les Saintes Femmes au tombeau (fin du XVIe siècle)
LES SAINTES FEMMES AU TOMBEAU, fin du XVIe siècle (baie 220).
Vitrail de la baie 214 : La Résurrection du Christ (fin du XVIe siècle)
LA RÉSURRECTION DU CHRIST de Nicolas Pinaigrier, 1586 (baie 214)
Le donateur (à droite) est présenté par saint Guillaume.
Ce vitrail s'inspire d'une peinture maniériste sur bois d'Antoine Caron, «La Résurrection du Christ»,
une œuvre où le Christ ressemble étrangement à Henri III !
Voir cette œuvre au Musée départemenal de l'Oise à Beauvais.
«Saint Bernard en oraison» par François-Vincent Latil  d'après Philippe de Champaigne, vers 1825
«Saint Bernard en oraison» par François-Vincent Latil
d'après Philippe de Champaigne, vers 1825.
Chapelle Saint-Bernard.
«La Crucifixion», anonyme, 2e quart du XVIIIe siècle
«Jésus enfant préchant, sainte Vierge, sainte  Anne et saint Joachim», anonyme XVIIe siècle
«Jésus enfant préchant, sainte Vierge, sainte Anne et saint Joachim»
Anonyme XVIIe siècle.
«««--- «La Crucifixion», anonyme, 2e quart du XVIIIe siècle.
Vitrail de la baie 224 : L'Incrédulité de saint Thomas (fin  du XVIe siècle)
L'INCRÉDULITÉ DE SAINT THOMAS, fin du XVIe siècle (baie 224).
Vitrail de la baie 226 : L'Ascension (fin du XVIe siècle)
L'ASCENSION, fin du XVIe siècle
(Baie 226).
Vitrail de la baie 219 : Le Couronnement de la Vierge (vers 1550). Registre central.
LE COURONNEMENT DE LA VIERGE, vers 1550, registre central (baie 219).
Le visage de la Vierge est clairement une re-création de la fin du XIXe siècle.
«Le Martyre de sainte Catherine» attribué à Thomas Goussé, vers 1650
«Le Martyre de sainte Catherine»
Tableau attribué à Thomas Goussé, vers 1650.
Vitrail de la baie 223 : La Crucifixion (milieu du XVIe siècle) Vitrail de la baie 222 : Les disciples d'Emmaüs (fin du XVIe siècle). Registre central.
LES DISCIPLES D'EMMAÜS, vers 1587, registre central (baie 222).
Œuvre de l'atelier de Nicolas Pinaigrier.

«««--- LA CRUCIFIXION ET LA DESCENTE DE CROIX, vers 1587 (baie 223).
Œuvre de l'atelier de Nicolas Pinaigrier.
LES CLÉS PENDANTES DE LA CROISÉE ET DE LA PREMIÈRE TRAVÉE DE LA NEF
Jubé, voûte et élévations du chœur
Jubé, voûte et élévations du chœur.

La voûte de la croisée. C'est l'un des chefs-d'œuvre de l'église. Elle a été posée vers 1584-1586, puis restaurée par Victor Baltard vers 1858. Cette voûte est un magnifique exemple de la transition du gothique tardif au style Renaissance. Les tiercerons qui divisent l'espace sont gothiques, tout comme les clés pendantes et les disques ajourés aux fines ciselures qui meublent ces espaces. Les autres motifs de l'ornementation sont totalement Renaissance. La fantaisie artistique de l'ensemble est aussi typique de la fin du XVIe siècle : les symboles ailés des évangélistes (ci-contre le taureau de Luc) sont associés à des putti, eux aussi ailés. La clé pendante centrale accuse une hauteur de 2,40 mètres. Elle est «maintenue en équilibre près de cinq mètres sous le sommet de la voûte grâce à des liens courbes raidis par une armature métallique invisible, présente dès l'origine (...)», lit-on dans l'ouvrage sur l'église Saint-Étienne-du-Mont paru aux éditions Picard.
Le visiteur qui prend le temps d'admirer ce système de clés pendantes y reconnaîtra une allégorie de la voûte étoilée, les disques ajourés aux fines ciselures tenant le rôle des étoiles.
La voûte qui orne la première travée de la nef (photo ci-dessous), devant le grand orgue, a été posée vers 1624. Elle applique le modèle avec liernes et tiercerons, un classique du gothique flamboyant.
Source : Saint-Étienne-du-Mont par Étienne Hamon & Françoise Gatouillat, éditions Picard, 2016.

Clé pendante dans l'avant-nef
Clés pendantes au-dessus de la première travée de la nef.
Les clés pendantes sur la voûte de la croisée
Les clés pendantes à la voûte de la croisée ou le mariage de l'art gothique et de l'ornementation Renaissance.
Le taureau de Luc entouré de têtes d'angelots (voûte  de la croisée)
Le taureau ailé de saint Luc entouré de têtes d'angelots ailés à la voûte de la croisée.
Clé pendante à la voûte de la croisée Clé pendante dans l'avant-nef
Clé pendante ornée d'angelots
au-dessus de la première travée de la nef
(style gothique flamboyant).


«««--- L'imposante clé pendante
de la voûte de la croisée
(2,40 mètres de haut).
LE JUBÉ (1530-1540)
Vue d'ensemble du jubé
Vue d'ensemble du jubé.
L'escalier sud du jubé
L'escalier sud du jubé et sa luxuriante ornementation.
La porte nord du jubé
La porte nord du jubé.
Le jubé vu du chœur
Le jubé vu du chœur avec l'orgue de chœur.
Porte sud du jubé : partie supérieure avec l'ange
La porte sud du jubé, partie supérieure.
Renommée ailée païenne
Renommée ailée païenne (un sein est dévoilé) en bas-relief dans un écoinçon du jubé.

Le jubé de l'église Saint-Étienne est le seul qui subsiste à Paris. Sa conception date du début des années 1530, celle des escaliers nord et sud, des années 1540. Les portes latérales et la statuaire sont, quant à elles, du XVIIe siècle. La tribune, de neuf mètres de long, est soutenue par une voûte en anse de panier qui culmine à quatre mètres.
Une ornementation typique de la première Renaissance (les écoinçons) s'allie au style gothique classique de la balustrade et des escaliers, style non dénué d'influence mauresque.
L'incertitude la plus complète règne sur l'auteur ou les auteurs de ce jubé. Les sources manquent. On a parlé de Pierre Biard (auteur d'un Calvaire sur la tribune, mais définitivement écarté), puis de Philibert Delorme pour la conception des escaliers. On y a ajouté la piste des maîtres d'œuvre de l'église au XVIe siècle (Nicolas et Antoine Beaucorps, Pierre Nicolle). Et un dernier ajout, celui d'un «maître Clément», assez mystérieux.
Au cours de son histoire, le jubé a été remanié selon les caprices du temps et les modes décoratives. Sous Louis XVI, la tribune ne portait qu'un crucifix et les deux piliers nord et sud accueillaient chacun un autel. À la Révolution, toute la statuaire a disparu. Aux écoinçons de la tribune, les anges porteurs des instruments de la Passion ont fait place à des renommées païennes tenant des palmes, des rameaux ou des couronnes (voir la photo ci-dessus). Après le Concordat, un Christ de pitié et deux anges ont été placés sur la tribune. Depuis 1851 s'y dresse un grand Christ en croix provenant de la chapelle de l'École polytechnique. Il a été sculpté dans les années 1820 par l'artiste autrichien Ulrich de Grienewald, à la suite d'une commande du duc d'Angoulême, protecteur officiel de l'École depuis 1816.
Source : Saint-Étienne-du-Mont par Étienne Hamon & Françoise Gatouillat, éditions Picard.

L'intrados du jubé
L'intrados du jubé.
L'intrados du jubé
Le Christ en croix d'Ulrich de Grienewald (vers 1825), détail.
Vue du jubé et de la porte sud depuis le bas-côté sud
Vue du jubé et de la porte sud depuis le bas-côté sud.

Quand le jubé faillit être détruit...
Avec la Contre-Réforme, l'heure n'est plus aux jubés. Regardés comme de véritables murs séparant la nef et le chœur, ils isolent les desservants des fidèles. Le Concile de Trente (1542-1563) eut à cœur de faire disparaître cette barrière pour réunir la communauté lors des offices. Dans les années 1730, Saint-Germain-l'Auxerrois perdit son jubé qui datait du XVIe siècle. La destruction de celui de Saint-Étienne-du-Mont se rapprochait. En 1737, le conseil de fabrique délibéra sur une offre proposée par une personne qui désirait rester anonyme : 3000 livres pour détruire le jubé. Mais le principal problème relevait de l'architecture : la disparition du jubé risquait-elle de fragiliser l'édifice ? Le conseil de fabrique avait déjà pris l'avis des hommes de l'art et la réponse était négative. La démolition fut donc votée, mais à une condition : elle ne pourrait être validée qu'après obtention d'un rapport écrit, et dûment signé, concluant à l'absence de risques d'éboulement. Cependant l'opération fut ajournée : d'anciens marguilliers s'y opposaient farouchement.
En 1740, deuxième offensive des partisans de la démolition. Un architecte, Hivert, excédé par ce jubé qu'il regardait comme un pont cachant la célébration des saints Mystères, en proposait le démontage. Mieux : il proposait aussi le réemploi de ses éléments dans la construction de deux autels blottis contre les piliers de l'entrée du chœur. Et son rapport précisait : «comme à Notre-Dame».

Hivert voyait-il dans cette comparaison un atout décisif ? Toujours est-il que la fabrique temporisa à nouveau. Visiblement, l'unanimité n'était pas faite, d'autant plus qu'une perte substantielle de revenus était à craindre. En effet, des particuliers louaient des emplacements sur la tribune du jubé, ce qui rapportait 60 à 80 livres par an à la fabrique.
À cette époque, l'église subissait un vaste réaménagement dans les chapelles du chœur et du jubé ainsi qu'un transfert de la sacristie. Il fallait trouver les financements. Or, c'est aussi dans ces années, en 1758 précisément, que l'architecte Jacques-Germain Soufflot commença à consolider le terrain - gorgé de galeries plusieurs fois centenaires - prévu pour la nouvelle église abbatiale Sainte-Geneviève qui deviendra le Panthéon. (Louis XV n'en posera la première pierre qu'en 1764.) Évidemment, les donateurs préféraient privilégier l'édifice qui allait abriter les reliques de la sainte patronne de Paris plutôt que de donner pour l'aménagement de l'église paroissiale. Pour la fabrique de Saint-Étienne, les ressources se tarissaient. Il y eut pis : en 1760, un incendie consuma une partie du mobilier, au sud de la nef. L'orgue de tribune fut gravement touché. Maçons, charpentiers, couvreurs, serruriers et facteurs d'orgue ne terminèrent la restauration qu'en 1768. Et on ne parla plus de la démolition du jubé.
Source : Saint-Étienne-du-Mont par Étienne Hamon & Françoise Gatouillat, éditions Picard, 2016.

L'ORGUE DE TRIBUNE DU XVIIe SIÈCLE
L'orgue de tribune
L'orgue de tribune et la clé pendante sur la voûte.

L'orgue de tribune est l'un des chefs-d'œuvre de l'église Saint-Étienne, l'un des plus beaux de la capitale et le plus ancien totalement conservé. Le devis de la construction remonte à 1631 : Pierre Pescheur pour l'instrument et Jean Buron pour la menuiserie. La beauté de l'orgue saute aux yeux de tous les visiteurs. Harpies, anges accroupis, anges musiciens, angelots et Christ ressuscité contribuent à ce déploiement de faste, encore accentué par les bas-reliefs au niveau du positif. Les sources mentionnent que l'orgue a été choyé pendant le premier siècle de son existence. En 1760, il est victime d'un incendie et le facteur Nicolas Somer en entreprend la restauration en 1766. En 1772, François-Henri Clicquot en fait un grand instrument qui porte en lui tout le classicisme français tardif. Dans les années 1830, une restauration ratée aggrave son état. En 1862, Cavaillé-Coll en entreprend une autre - sans l'accord de la fabrique qui manque de ressources. Enfin, en 1929, arrive le jeune compositeur et organiste Maurice Duruflé. Sous son impulsion, la ville de Paris charge la maison Gonzalez, en 1934, d'une restauration profonde. Interrompue par la guerre, celle-ci reprend sous la houlette de la manufacture Beuchet-Debierre. Ce n'est qu'un demi-succès et Maurice Duruflé ne cache pas sa déception. Aussi, en 1975, la maison Gonzalez, de nouveau à la manœuvre, procède-t-elle à une ré-harmonisation complète. À ce jour, c'est le facteur Bernard Dargassies qui entretient l'instrument présenté comme un orgue néoclassique.
Source : Saint-Étienne-du-Mont par Étienne Hamon & Françoise Gatouillat, éditions Picard, 2016, article d'Henri de Rohan-Csermak.

Le Christ sur la tourelle principale Une harpie soutenant l'orgue de tribune
Harpie soutenant la tourelle sud de l'orgue de tribune.
(Menuisier Jean Buron, 1631).
«««--- Le Christ ressuscité sur la tourelle centrale
de l'orgue de tribune.
L'orgue de tribune : le Christ et les anges sur les tourelles
Buffet de l'orgue de tribune : Christ ressuscité et anges musiciens sur les tourelles ;
deux anges adolescents sur l'entablement des plates-faces.
L'autel de messe de la croisée et le jubé
La croisée du transept avec l'autel de messe et le jubé.
Cliquez sur la photo pour aller en page 2.
La nef et l'orgue de tribune vus de la croisée
La nef et l'orgue de tribune vus de la croisée.
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Documentation : «Saint-Étienne-du-Mont» par Étienne Hamon & Françoise Gatouillat, éditions Picard, 2016
+ «Les églises de France, Paris et la Seine», éditions Letouzey et Ané - Paris, 1936
+ «Les églises flamboyantes de Paris» par Agnès Bos, éditions Picard, 2003
+ «Corpus Vitrearum, les vitraux de Paris, de la Région parisienne, de la Picardie et du Nord-Pas-de-Calais», éditions du CNRS, 1978
+ «Vitraux parisiens de la Renaissance» édité par La Délégation à l'Action artistique de la ville de Paris
+ «Saint-Étienne-du-Mont, au cœur du quartier latin», brochure de l'association «Art, Culture et Foi-Paris», 2012
+ feuillets de présentation de l'église disponibles dans l'église Saint-Étienne-du-Mont.
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